Angoulême: le cas d’un mineur malien isolé et hospitalisé crée l’émoi

Article La Charente Libre du 09/03/22

Depuis quatre ans, les bénévoles de l’Aadmie épaulent les jeunes considérés comme majeurs.

Photo archives CL

publié le 8 mars 2022 à 19h25, modifié à19h25.

 

Un adolescent de 17 ans, considéré comme majeur par le Département, a été hospitalisé à Angoulême avec une tuberculose. L’Aadmie s’émeut de sa prise en charge.

C’est l’histoire d’un jeune Malien arrivé en Charente en janvier dernier, après un passage en Italie, où il a séjourné dans un camp. Il fait partie de ceux qu’on appelle les mineurs étrangers isolés ou les mineurs non-accompagnés. À son arrivée à Angoulême, il a été pris en charge par le Département, le temps de vérifier son âge. C’est la procédure : l’aide sociale à l’enfance, qui dépend du conseil départemental, ne prend sous son aile que les mineurs. Les autres, ceux qui ont plus de 18 ans, sont renvoyés vers le 115 et vers l’Aadmie, une association née il y a plus de quatre ans pour trouver des hébergements solidaires à ces jeunes majeurs désemparés.

L’association s’est émue du cas de cet adolescent dans un courrier adressé au Département. Parce qu’ils l’ont récupéré le 21 février dernier, malade, avec une forte toux. Hospitalisé la semaine dernière avec une tuberculose, il doit encore subir plusieurs jours de soins et un traitement antibiotique même si son cas n’inspire plus d’inquiétude. Mais l’Aadmie ne comprend pas. « Il a été confié à l’association Père Le Bideau et est resté cinq semaines sous la responsabilité du Département, entre le 17 janvier et le 21 février, sans jamais avoir été testé pour la tuberculose, s’émeut Romain Treppoz, membre du conseil d’administration de l’Aadmie. C’est l’une des choses qu’on leur fait faire en premier car sans, ils ne peuvent rien faire. Pour pouvoir être scolarisés par exemple, ils doivent prouver qu’ils n’ont pas la tuberculose. » Le test a été réalisé le 21 février. Toutefois, le Département indique que l’adolescent a vu un médecin généraliste à Brie, le 10 février, qui lui a prescrit un sirop pour la toux et de la ventoline.

“On va le mettre à l’abri”

Deuxième point qui agace l’association : un couac autour de l’âge du jeune garçon. « Environ 30 % des jeunes sont reconnus mineurs par l’ASE. Dans le cas contraire, en général, la conclusion des évaluations est claire. Elle dit qu’un jeune est ‘manifestement majeur’. Dans le cas présent, elle stipulait bien qu’il demeurait un doute quant à sa possible minorité. Or les textes disent que le doute doit profiter au jeune, poursuit Romain Treppoz. En plus, ce jeune avait son acte de naissance authentique. » « Les documents présentés ne peuvent, sans photo d’identité, être rattachés avec certitude à la personne qui les présente », répond le Département. Entre-temps, le garçon a reçu son passeport papier, prouvant qu’il a eu 17 ans le 6 mars dernier, et bonne nouvelle, « on cherche une solution pour qu’il soit mis à l’abri par l’ASE sans avoir à passer par la case tribunal », pour faire reconnaître sa minorité, indique Maryline Vinet, vice-présidente en charge de l’enfance et de la famille au Département. Les choses devraient donc rentrer dans l’ordre prochainement.

Minorité : le Département ne fait plus appel

Quand le Département conclut qu’un jeune est majeur, le jeune va la plupart du temps devant le tribunal d’Angoulême, avec l’aide de l’Aadmie et un avocat, pour contester la décision. Quand le tribunal d’Angoulême statuait que le jeune était mineur, le Département faisait alors quasi systématiquement appel, sous la précédente majorité. « Ce n’est plus le cas, assure Maryline Vinet, vice-présidente. Notamment parce que le tribunal de Bordeaux où sont jugés les appels a recours à des tests osseux. Je trouve cela monstrueux. » Au premier trimestre 2021, il y avait eu six appels par le conseil départemental. Le nombre de mineurs non-accompagnés accueillis au conseil départemental a diminué, le covid étant passé par là. Ils étaient 145 en 2019, 117 en 2020 et 111 en 2021. Actuellement, 103 sont confiés à l’ASE.